Quelle est la genèse de cette série ?
L’aventure a commencé en 2015 suite à ma dernière année au Fooding. Mon père est cheminot, j’en ai donc profité pour m’offrir un tour de France des buvettes à proximité des stades que je prenais en photo et présentais sous la forme de chronique culinaire. J’aime le foot mais je souhaitais avant tout saisir l’esprit populaire et l’ambiance chaleureuse qui règne avant les matchs entre les supporters en image et en son.
As-tu repéré des spécialités gastronomiques différentes selon les régions arpentées ?
Si la base commune à toutes tourne autour des frites, hot-dog, saucisses et parfois même des kebabs, on y trouve également les spécialités propres à chaque région comme la socca et la pissaladière à Nice, le vin chaud à Annecy et la galette saucisse à Rennes. Les friteries sont nombreuses à Lille tandis qu’à Marseille ce sont surtout les camions à pizzas qui sont en nombre.
Y a-t-il une évolution de l’offre culinaire dans les buvettes de stade entre les débuts de cette série et aujourd’hui ?
De plus en plus de buvettes franchisées ont été installées à même les stades de foot dans des villes comme Lyon, Bordeaux ou encore Nice. On assiste à une homogénéisation des offres, et à l’aseptisation de ces points de rencontre où l’on peut désormais commander son dwich’ depuis les gradins, venir le chercher une fois prêt, sinon se le faire apporter pendant le match. Cela conduit également à la délocalisation des buvettes historiques souvent très loin des stades provoquant ainsi des levées de bouclier.
Utilises-tu une technique spécifique ?
Pas particulièrement, je shoote principalement avec mon appareil photo numérique. J’essaye de cadrer des scènes de vie, des détails amusants comme un morceau de pain coincé entre les dents d’un supporter, de capturer des moments d’amitié. Le fait d’être à la fois journaliste et photographe me permet également de poser un regard différent sur la photo, en créant des situations, des jeux de mots. Parfois je leur demande aussi de poser pour moi.
Une photo que tu affectionnes particulièrement ?
J’avais repéré une mère et son fils avant un match à Guingamp où il y a d’ailleurs plus de place en tribunes dans le stade que d’habitants dans la ville — 6 900 habitants pour 18 000 places si je me souviens bien. Ils venaient souvent voir des matchs ensemble, ce qui rompt avec le cliché du père et du fils supporters. Au moment de prendre la photo, elle pose la main sur l’épaule de son garçon pour certainement montrer son attachement et lorsque l’on s’attarde sur la photo on lit le mot frère sur la cannette de coca posée entre les deux.
Certaines ont même été exposées sur les murs des Rencontres d’Arles dans un format particulier…
Effectivement, j’ai encadré quelques tirages dans des barquettes de frites que j’avais exposé et mis en vente à l’occasion du Off des Rencontres.
Est-ce qu’il y a un souvenir qui t’a marqué ?
Parmi les quelques restos faisant office de point de rencontre près du Parc des Princes il y a une église où une buvette a été installée de chaque côté avec des grilles servant de barbecue sur lesquelles cuisaient des pains et des saucisses. Entre deux prix affichés tu pouvais lire les psaumes du jour et les personnes derrière l’étal portaient des hoodies floqués « Notre Dame est là pour vous servir », un décalage marrant et assez fort entre les deux religions, celle de Dieu et celle du foot.