Comment es-tu devenu chef chez Dill ?
J’ai passé l’équivalent d’un CAP de cuisine ici, en Islande, après avoir travaillé dans pas mal de cafés et de bars proches du centre-ville de Reykjavik. Une fois diplômé, je suis immédiatement parti au Danemark où j’ai vécu pendant 7 ans. En 2014, j’ai intégré la cuisine de Dill et j’en ai pris la tête un an plus tard.
Y a t-il une nouvelle cuisine nordique ?
Oui, c’est un mouvement (lancé entre autre par René Redzepi du NOMA, ndlr) qui incite les chefs à sourcer leurs produits à l’échelle la plus locale possible et à utiliser des méthodes de cuisson locales comme par exemple fumer ou saler les aliments. En fait, cette philosophie peut être appliquée partout dans le monde.
De quelle manière est-ce que le territoire et le climat façonne ta cuisine ?
On veut utiliser des ingrédients de saison et du terroir dans la mesure du possible mais puisqu’on vit sur une île volcanique au nord de l’Océan Atlantique, on a parfois besoin de déroger un peu à la règle durant les hivers les plus rudes.
Comment décrirais-tu la bouffe islandaise ?
Elle est très simple et repose principalement sur différentes méthodes de préservation : la fermentation, le fumage au fumier et la conservation dans du petit-lait. Chacune de ces manières de préparer le produit assurera un goût très distinctif en bouche.
À quel moment as-tu réalisé qu’en tant que chef tu voulais mettre en avant les produits islandais plutôt que d’importer du poisson de l’étranger ?
Ça a simplement plus de sens. On vit sur une île au beau milieu de l’océan, le poisson très frais est donc à portée de main. La nourriture ne voyage pas très bien et perd très vite de sa fraîcheur : si on veut importer ici, on passe forcément par les airs ou la mer et on ne s’y retrouve pas, en termes de qualité.
Si tu devais résumer Dill en un seul plat, ce serait lequel ?
On change très souvent de menu mais il y a des plats qui ne bougent pas d’un pouce pendant longtemps. Par exemple, celui à base de hareng fumé, de purée de pommes de terre et de skyr (une spécialité islandaise de la famille du yahourt qui s’apparente à un fromage très tendre, ndlr).
Y a t’il un produit que tu aimes par dessus-tout travailler ?
J’adore partir en excursion l’été pour cueillir des herbes sauvages. Le thym arctique et l’angélique sont très courantes, même dans le centre de Reykjavik et ils sont sûrement mes ingrédients fétiches.
Aujourd’hui, Dill est le seul restaurant étoilé du pays : est-ce que tu t’y attendais ?
On savait que Michelin était venu sur notre île et même au resto donc on s’attendait un peu à ce que Dill soit mentionné dans le guide mais à aucun moment je n’ai pensé qu’on allait recevoir une étoile et je me rappellerai toujours de ce coup de téléphone par lequel on m’a appris la très bonne nouvelle.
Est-ce que cela a eu un impact sur la scène culinaire islandaise ?
Je crois que ça motive vraiment les chefs et les restaurateurs à se surpasser, ça donne aussi à la ville une vraie reconnaissance de notre cuisine qui est en perpétuelle évolution.
De qui est-ce que tu t’inspires pour créer ?
De David Bowie et de ma fille.
Quels sont tes projets à venir ?
Je ne peux pas trop en dire mais on est en train de travailler sur l’ouverture d’un restaurant à l’Hôtel Holt, un hôtel-boutique du centre-ville qui date de 1965. Mais je garde la surprise …
Comment imagines-tu l’avenir de Dill ?
Je ne souhaite pas que la recette change. On fait désormais partie de la scène culinaire et on continuera encore longtemps à servir des plats étranges, créés à partir de produits locaux.