Les boxeuses de Kaboul dans l'œil d'Abbie Trayler-Smith

Nous sommes en 2010 à Kaboul, en Afghanistan. Abbie Trayler-Smith est déjà habituée des zones de conflits et de post conflits comme en témoignent ses photos réalisées au Sahel, au Mali ou encore au Yémen. Pour sa série The Boxers of Kabul, la photographe est partie à la rencontre de jeunes adolescentes membres d’un club de boxe.
MINT

Comment décririez-vous votre travail ?

Abbie Trayler-Smith

Je suis commissionnée par des associations ou des magazines pour témoigner des complexités de notre monde et ce qu’il s’y passe. Pour moi, tout tourne autour de ce qui nous rend humain, quelles émotions et expériences communes nous partageons et ce que nous apprenons les uns des autres. Dans les zones difficiles, ce que nous voulons et ce dont nous avons besoin paraît très apparent, très cru et je trouve cette forme de résilience de l’humanité extraordinaire et inspirante. Je dirais que mon but est de permettre à la personne qui regarde mes photos de ressentir des émotions, de l’empathie. D’essayer de saisir ce que ça pourrait être d’être la personne sur cette photo et à travers cela, comprendre un peu mieux le monde qui nous entoure.

M

Quelles sont les difficultés auxquelles vous faites face dans votre travail?

A TS

Devoir travailler avec des paramètres comme des couvre-feux, ne pas pouvoir rester au même endroit trop longtemps alors que capturer l’essence d’une histoire nécessite du temps… Rester en sécurité tout en m’assurant que les gens impliqués dans mes sujets le sont aussi.

M

Quelle est l’histoire derrière cette série ?

A TS

The Afghan Women’s Boxing Club est la seule organisation de ce type dans tout le pays. Elle compte une vingtaine de membres, pour la plupart des jeunes filles âgées de 15 à 18 ans. Toutes partagent une passion pour ce sport, si bien que cela semblerait inapproprié, et ce, même dans des pays bien moins conservateurs. En Afghanistan, l’existence d’un tel club témoigne de la détermination de ses membres de se soulever face au manque de libertés des femmes qui peinent à jouer un rôle au sein de la société à tous les niveaux. En effet, la liberté des femmes a été extrêmement restreinte à cause d’anciennes coutumes tribales, d’une forme très stricte de l’Islam et d’une société dominée par l’homme dans un pays qui a été presque constamment en guerre depuis les années 70.

M

Comment une discipline aussi triviale que le sport peut-elle se développer dans un pays en crise?

A TS

Promouvoir la boxe et le sport pour les hommes et les femmes est un véritable défi dans un pays qui fait face à de multiples insurrections, des attaques terroristes régulières et une très grande pauvreté. C’est dire à quel point ce club compte pour ses adhérentes.

M

Que leur apporte la boxe au quotidien ?

A TS

Lorsqu’on les a invitées à s’engager dans ce club, les filles ont sauté sur l’occasion. Pour elles, c’était la liberté. Quand on s’essaye à la boxe, on se rend compte à quel point c’est un exercice libérateur. J’ai d’ailleurs commencé la boxe en Angleterre et tout comme ces jeunes filles, j’ai trouvé que c’était un sport qui libère les tensions et nous fait ressentir une forme de puissance.

M

Qu’avez-vous appris durant ce voyage ?

A TS

J’ai compris à quel point ces jeunes filles sont fortes et incroyables. À quel point les gens peuvent s’épanouir et grandir quand on leur donne ne serait-ce que la moitié d’une chance, peu importe où l’on se trouve dans le monde et peu importe ce qu’il faudra surmonter pour y arriver.

-> www.abbietraylersmith.com
Instagram : @abbiets

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Déborah Pham
Co-fondatrice de Mint et du restaurant parisien Maison Maison. Quand elle n’est pas en vadrouille, elle aime s’attabler dans ses restos préférés pour des repas interminables arrosés de vins natures. Déborah travaille actuellement sur différents projets éditoriaux et projette de consacrer ses vieux jours à la confection de fromage de chèvre à la montagne.

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