L'Amour Food
Comment as-tu eu l’idée de réaliser ce documentaire ?
Je suis journaliste culturel – j’ai commencé critique de cinéma, j’écris majoritairement sur les séries depuis maintenant dix ans. Mais j’ai toujours adoré manger et aller dans les restaurants. Depuis quelques années, je trouve comme beaucoup d’observateurs qu’il se passe quelque chose en France et à l’étranger, une reformulation de l’expérience culinaire autour de principes de rigueur (choix méticuleux des produits, technique imparable) mais aussi d’un véritable hédonisme dont notre génération touchée par la crise a besoin. La bouffe n’a plus rien d’ennuyeux, elle rythme nos vies avec plus de style que jamais. Faire ce documentaire, c’était une manière pour moi de me frotter à l’idée que la cuisine est devenue partie intégrante de la culture pop.
Qui étaient tes compagnons de route sur le tournage ?
La première personne qui m’a accompagné sur L’Amour Food est Arielle Saracco, directrice de la création originale à Canal Plus, qui a accepté tout de suite ma proposition. J’ai travaillé en étroite collaboration avec mon producteur David Coujard (Agat Films). Pendant la fabrication concrète, le chef opérateur Julien Gidoin m’a donné l’impression par moment de réaliser un « vrai » film avec des séquences visuellement très travaillées. Ensuite le monteur Thibaut Sève a articulé mon propos avec grâce. Un documentaire comme celui-là se fabrique grâce à une petite équipe très soudée.
Combien de temps a duré le tournage (puis le montage) ?
Nous avons tourné sur une période d’environ huit mois, selon la disponibilité des intervenants. J’ai passé sept semaines l’été dernier en montage. 1h15 de film représente beaucoup de travail.
Quels souvenirs gardes-tu de ce travail ?
La soif de communiquer et de partager de la part de la nouvelle génération de chefs m’a vraiment impressionné. Derrière les restaurants « branchés » d’aujourd’hui comme par exemple le Châteaubriand, on trouve des démarches sincères et parfois politiques. Croire qu’ils ne sont que des beaux gosses barbus et tatoués, c’est commettre une erreur. J’espère que mon documentaire le montre. Au-delà de cette question, je me suis vraiment rendu compte pendant le tournage à quel point la réalité du travail de cuisinier est difficile, un vrai sacerdoce. Comme les chefs, je me suis levé tôt et couché tard, j’ai mangé à des heures décalées… J’ai vécu comme un cuisiner pendant quelques mois.
Est-ce que tu aurais une anecdote marquante à nous raconter ?
Sans hésiter la longue journée de tournage à Saint Jean de Luz, lorsque nous avons demandé à Bertrand Grébaut (chef du Septime) et Alexandre Drouard (co-fondateur de Terroirs d’avenir) d’accompagner la pêcheuse Anne-Marie Vergez lors d’une sortie. L’idée était de montrer le circuit direct entre la pêche à la ligne et la table du restaurant. Et cela s’est transformé en moment épique. Nous avons levé l’ancre à bord du petit bateau d’Anne-Marie à quatre heures du matin. Après une heure ou deux, le caméraman n’a plus supporté le roulis et le tangage (assez forts, c’est vrai) et il a commencé à se trouver mal. Le problème, c’est qu’il restait six heures à tenir sur le bateau et que nous avions une séquence à tourner ! Il n’a plus été en mesure de tourner. Pendant que le pauvre tentait de se reposer, j’ai utilisé une deuxième caméra et finalement mon Smartphone. Au bout du compte, ce moment est amusant et plutôt structuré je l’espère, mais sa réalisation a été mouvementée. Heureusement, Bertrand Grébaut n’est pas tombé malade !
Si tu pouvais nous conseiller un endroit où aller dîner ce soir, ce serait quoi ?
J’adore le restaurant Hai Kaï, sur le Canal Saint Martin dans le 10e arrondissement à Paris. Amélie Darvas, la chef, a seulement 24 ans. Elle a été formé chez Eric Fréchon (Bristol) et propose une cuisine de produits pleine de peps, très inventive, sur des bases solides. La carte change tout le temps, manger là-bas est toujours une aventure raffinée.
Et pour une grande occasion ?
Le Restaurant Jean-François Piège, à l’étage de la brasserie Thoumieux, m’impressionne beaucoup. Deux étoiles qui en valent bien trois.
Pour jeter un oeil au trailer, c’est par ici.