Délices d'initiés : Yakumo Saryō (Tokyo)

Le bouche-à-oreille reste la manière la plus sûre de se régaler au restaurant, c’est pourquoi nous avons demandé à quelques gourmands bien renseignés de nous confier leurs restaurants favoris. Pas le meilleur mais celui où la magie opère entre atmosphère, service et cuisine.

Pierre Touitou, chef cuisnier

J’avais envie de parler de ce restaurant au Japon, Yakumo Saryo. Bien que j’ai eu la chance de manger dans de très bons restaurants dans ma vie, pleurer au restaurant ne m’est arrivé que trois fois. C’est un des plus beaux repas et une des plus belles expériences de ma vie. Dans la salle il y avait énormément de lumière, pour s’y rendre on passe par un portail puis sous un rideau traditionnel, enfin on descend les escaliers et on se retrouve dans un jardin qui encercle le restaurant. On peut y prendre le thé et manger des mochis mais aussi déjeuner. On y sert un repas omakase, c’est assez long.

Je me souviens qu’il y avait un consommé de bœuf dans une grande marmite en étain et que le chef y avait trempé du wagyu comme on le fait pour un shabu shabu. Tout était d’une justesse incroyable, même dans les saveurs les plus claires. Le riz est cuit juste pour toi, c’est le meilleur que j’ai mangé de ma vie. Il en va de même pour la soupe miso ou le sudachi (un agrume japonais, ndlr). À chaque fois que je mettais quelque chose dans ma bouche, ça devenait le meilleur de ma vie. Tout était désarmant de simplicité et contrairement à ce qu’on pourrait penser, leur vision n’était pas de montrer la qualité des produits, mais un état d’esprit pur.

La délicatesse dans le peu de gestes et d’interventions de la part du chef. Quand tu arrives on te donne un petit carnet dans lequel tu peux retrouver des traductions dans plusieurs langues écrites à la main. Tu as deux pages uniquement sur les textures, pour le mot gluant il y avait cinq mots différents. Après ce repas, j’ai flotté tout l’après-midi. On prend ton manteau puis tu te laisses glisser jusqu’à la fin du repas. C’était déconcertant. Du début à la fin, c’était déconcertant de beauté.

Article à retrouver dans Mint #21

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