On balance d’un coup de bras nos chaussures de marche et nos parkas sur la plage arrière de la voiture en espérant trouver notre chemin du premier coup. Ou se perdre. Au choix.
Comme pour nous tromper, les premiers kilomètres n’ont rien d’impressionnant et les parcours sont tracés, à l’image des parcs nationaux américains qui nous forcent à marcher dans les clous, refoulant nos désirs d’aventure. Dans un article du Guardian, un journaliste assurait que ces Twelve Bens n’étaient pas à prendre à la légère malgré leur quelques dizaines de kilomètres serpentant autour des montagnes.
Pourtant, le parcours est marqué et dallé. Impossible de se perdre ne serait-ce qu’un peu et de savourer pleinement ce retour à la nature. Plus loin, la pente s’accentue et ce qui ressemblait il y a peu à une promenade de santé devient plus ardu. La montagne devient plus pentue et plus escarpée et de moins en moins confortable. Le pépé croisé à l’entrée fonce d’une marche sportive en enjambant les marches en pierre glissantes sous un ciel menaçant.
Le ciel s’assombrit soudainement. Nous avions choisi ce sommet pour son point de vue sublime sur les larges plaines du Connemara jusqu’au Fjord de Kilkenny. La pluie bat de plus en plus fort alors que nous atteignons le haut de la montagne où s’amoncèlent des pierres formant d’étranges totems, une habitude de randonneur. Nous ne voyons rien à 10 mètres devant nous et avançons à tâtons, la tête enfoncée entre les épaules pour nous protéger du vent. Alors que rien ne le laissait présager, le brouillard se disperse dans la vallée laissant apercevoir les montagnes voisines, une habitude de la météo irlandaise. Une lumière rasante nous permet de voir au loin l’Abbaye de Kylemore. Nous empilons quelques pierres pour former à notre tour une statuette un brin bancale et reprenons la route.